Il était une fois un fantôme dont l’histoire avait seulement retenu le nom.
Aussi loin que sa mémoire portait, Folletto hantait les allées du château tombé en désuétude depuis bien des siècles. Rien ne laissait transparaître sur son visage livide et translucide qu’il fut un jour un jeune garçonnet avide de bonnes histoires et d’aventures aux quatre coins du monde. Pourtant…
Une douce nuit d’hiver, alors qu’il voletait d’un air las dans la ruine, il fit la rencontre de voyageurs arrêtés pour se reposer dans le jardin de la propriété. Ces trois individus à l’attitude louche l’accueillirent au coin du feu qu’il ne sentait pas. Ils discutèrent la nuit durant de leurs idées abracadabrantes, de leurs rêves et de leurs cauchemars. À sa plus grande surprise, ils restèrent le jour suivant, la semaine d’après… Puis pour toujours.
Folletto avait retrouvé goût dans son éternité à l’arrivée de ces trois énergumènes ayant pour compagnon plumes, papier, encre et imaginaire.
Ces passionnés des mots avaient pour ambition de bâtir un lieu qui leur survivrait, un endroit où des générations de leurs compères pourraient déambuler à leur tour pour vivre et créer en toute quiétude. Ils construisirent ensemble (mais surtout grâce à Folletto – note de Folletto-lui-même) l’Allée des Conteurs. Cet endroit n’était sur aucune carte et la légende de son existence ne se transmettait que de bouche à oreille. De maître à apprenti.
Alors que les trois fondateurs avaient disparu depuis fort longtemps et à l’approche d’un hiver plus rigoureux que tout ce qu’il avait connu, Folletto se mit en quête d’un livre qu’il avait lu du temps de sa vie.
Lorsqu’il le retrouva, ne subsistait plus de lui qu’une couverture desséchée par les années et un tas de papier effrité.
Lui vint alors une idée des plus saugrenues pour occuper ces flemmards de conteurs qui avaient investi l’Allée de ses anciens compagnons : ils devraient lui apporter des histoires pour égayer les trois veillées précédent l’une des fêtes les plus somptueuses de l’hiver : Noël.
« Mais pas n’importe comment ! précisa-t-il avec emphase à l’assemblée des villageois. Chacun d’entre vous devra proposer un conte transportant le lecteur dans un monde du passé, un monde du présent ou un monde du futur ! »
Ainsi avait-il exposé ce qui adviendrait et l’enthousiasme des conteurs lui souffla qu’il avait eu une formidable idée.