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Prologue
Publié par Théâs, le jeudi 29 janvier 2015

15 Septembre 2019

Tout transpirait la peur dans son bureau. Les effroyables peintures sur les murs, l’éclairage vacillant et les fluctuations aléatoires de la ventilation laissaient supposer qu’un problème plus grave était survenu ; connaissant la nature exacte des recherches menées dans les sous-sols du complexe de Waterfall, Henry Winters avait plus que jamais peur pour sa propre vie.

Les consignes en cas de contamination étaient pourtant on ne peut plus claires : rester à l’endroit où vous vous trouvez et barricader les portes en attendant le signal de fin d’alerte.

Peut-être n’était-ce qu’un simple début d’incendie ? Et si les systèmes informatiques étaient au cœur de la défaillance du système de sécurité ? Alors sans nul doute des ingénieurs compétents étaient-ils déjà affairés à pallier ce problème ?

Il plissa les paupières et enfonça encore un peu plus sa carcasse maigrelette dans le siège confortable recouvert de cuir; Henry était un cadre important aux yeux de l’équipe de direction et quoi qu’il ait pu imaginer, il n’avait aucune raison de s’inquiéter.

Bon sang, cela faisait tout de même une demi-heure que la porte verrouillée de son bureau restait indubitablement bloquée !

Une odeur nauséabonde avait progressivement envahit la pièce, amplifiant l’inquiétude de Henry et provoquant un haut-le-cœur qu’il ne put réprimer.

Après avoir déversé les restes de son repas dans la poubelle de bureau, il tenta de percevoir au travers de la porte en bois massif si sa secrétaire daignait enfin s’inquiéter du sort de son patron.

Prenant son courage à deux mains, il tenta de se calmer et colla une oreille attentive contre le bois glacé.

Rien.

Le souffle de la ventilation et les craquements du réseau électrique l’empêchait d’entendre quoi que ce soit d’autre que la voix nasillarde et atone du système de sécurité du complexe, énonçant les procédures d’évacuation d’urgence.

L’évidence de la gravité de la situation se posa sur les dernières bribes de son courage comme une chape de plomb.

Henry Winters travaillait pour la compagnie Marakov Global depuis trente ans ; œuvrant pour le compte des services de direction commerciale, il avait accès à tous les documents, tous les contrats et tous les projets de recherches. Employé modèle, il avait largement contribué à l’élaboration de la renommée de sa compagnie dans les domaines pharmaceutiques de traitement cellulaire et d’autres techniques médicales innovantes. Du moins s’en était-il persuadé au fil des ans.

Mais pour que de telles recherches puissent avoir lieu, la contrepartie était le développement de projets moins altruistes, plus rentables et surtout plus susceptibles d’attirer des financements extérieurs.

Dans les années 90, Marakov Global avait été l’un des plus gros producteurs d’armes biologiques dont le développement requérait une expertise particulière que les équipes de la compagnie possédait. Bien sûr, pour le grand public, les découvertes devaient rester de l’ordre du domaine médical et strictement à vocation thérapeutique. Aussi, la communication était-elle essentiellement basée sur ces projets de recherches.

« Andréa ? » dit-il en frappant à la porte, et en espérant une réponse de la part de la jeune femme censée se trouver de l’autre côté.

Mais rien ne vint. Le silence resta sa seule compagne et le quinquagénaire se laissa tomber sur le sol froid, mains portées à son visage comme pour calmer ses angoisses les plus profondes.

Après quelques instants passés à reprendre ses esprits, il se releva et entreprit d’essayer d’entrer en communication avec le service de sécurité.

Plus aucun système de communication n’avaient fonctionné depuis la coupure générale d’électricité qui, il en était certain avait dû toucher tout le complexe.

Décrochant le téléphone posé sur son bureau, il n’y avait plus aucune tonalité et les fluctuations énergétiques rendaient impossible toute tentative de connexion au réseau informatique. Non, il se trouvait vraiment seul et Henry, malgré son âge avait une peur panique de la solitude, bien plus encore que du noir ou de la situation stressante de se retrouver enfermé dans son bureau dont la seule issue avait été condamnée.

« Calme-toi, réfléchis, dit-il pour se donner du courage. Rassemble tes affaires, et prépare-toi à partir, quelqu’un va bien finir par venir te chercher. »

Mais l’auto-persuasion était un art qui lui échappait clairement.

Les minutes s’étirèrent et, privé de tout contact humain depuis des heures, le vieux commercial devint un autre homme : saisissant le pied en métal de la lampe il entreprit de briser la porte. Le premier choc fut rude et la porte à peine entamée par le coup ne bougea pas d’un pouce. Il entendit alors un bruit qu’il avait espéré depuis longtemps : une conversation rythmée et aux éclats de voix graves filtrait à travers la porte en un mince filet de paroles incompréhensibles.

« Heeeey ! Je suis là ! Sortez-moi de là ! » hurla-t-il sans que les dites voix ne semblent l’entendre.

Puis l’on frappa la porte avec vigueur : une, deux puis trois fois avant que le bois ne cède.

La lumière l‘aveugla et il vit des formes étranges se mouvoir vers lui avant d’entendre l‘un des hommes qui se trouvait engoncé dans une combinaison de protection dire :

« On en a trouvé un vivant, central. Préparez la décontamination. »

Un autre qu’il n’avait pas vu s’approcher si près de lui enfonça une seringue dans son cou et la sanction fut immédiate : tout devint noir autour d’Henry Winters. Il s’écroula sur le sol, assommé et inconscient.

  
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