Lecture d'un chapitre
1 « L'Eveil »
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Publié par Nayaly, le lundi 23 septembre 2019

Nous cherchons un endroit où passer la nuit avec Shayna, ma louve blanche géante, car nous marchons depuis ce matin. C’est derrière un bosquet que nous trouvons notre bonheur. J’installe le camp et je sors du pain ainsi qu’un morceau de viande que j’ai acheté hier à Kanama, un petit village de fermier. Pendant que je déguste ce maigre repas, je me remémore ce pour quoi j’en suis venu à faire ce voyage. Je revois alors mon maître Karsen nous expliquer, à Shân et moi, qu’il était temps pour nous de franchir un pas dans notre formation de mage harmoniste. Il faut désormais que nous partons seul avec notre naylika, pour découvrir notre spécialisation. Il dit que nous la découvrirons en explorant le monde. Mais comment vais-je savoir si je l’ai trouvée ? Apparemment c’est quelque chose qui doit me donner envie d’évoluer dans le monde de la magie. Mais ce domaine est tellement vaste que je ne sais même pas ce que je voudrais. Après tout, ça vient peut être tout seul. Je dois sûrement m’inquiéter un peu trop.
Bon, en premier, nous avons décidé d’aller voir Leylan, ma soeur, ça fait six mois qu’elle est partie à Ekadan pour y faire sa formation à l’Académie des Guerriers. Elle m’a dit qu’elle voudrait intégrer les Fines Lames de la Garde Royale un jour et j’espère qu’elle y arrivera. En attendant, je vais allez me coucher, on a encore trois bons jours de marche devant nous avant d’arriver à la capitale. Shayna s’installe près de moi et je m’allonge pour finir par m’endormir contre son flanc.
Au petit matin, alors que le soleil se lève tout juste à l’horizon, nous voilà déjà reparti d’un bon rythme. Et au troisième jour, lorsqu’il est au plus dans le ciel, nous franchissons enfin les portes de la grande cité. Ekadan est entouré de plusieurs couches de remparts, les rumeurs disent même qu’elle est imprenable. Une fois à l’intérieur, nous partons en quête de l’Académie des Guerriers. C’est une vieille dame assise sur un banc devant chez elle qui nous indique le chemin. En arrivant à destination, je peux constater que c’est la pause de midi et j’aperçois Leylan assise, seule, contre un arbre dans la cour devant le bâtiment. Nous nous approchons donc et lorsqu’elle nous voit, elle se lève d’un bond pour venir se jeter dans mes bras. Je lui rends son étreinte et ma louve frotte son museau contre le visage de ma soeur. Elle l’enlace à son tour et nous demande ensuite ce que nous faisons ici. Quand j’ai fini de lui expliquer, elle me dit qu’elle doit retourner en cours car la cloche de fin de pause ne va pas tarder à retentir, mais que nous pouvons attendre ce soir pour aller boire un verre dans une taverne et discuter. J’approuve totalement et nous la laissons retourner en classe.
Nous déambulons un peu dans la cité toute l’après-midi. Mais c’est plus difficile que je ne le pensais car tout le monde nous regarde d’un air de mépris sur notre chemin. Il faut dire que nous, les Halyana, le Peuple de le Nuit, ne sommes pas très bien vus à travers une grande partie du Royaume car nous avons un mode de vie nocturne et sommes regroupé dans une seule région : Meludya. Et depuis que cette dernière est occupée par des mages noirs, ça ne fait qu’empirer l’avis que les gens ont de nous. Notre peau bleue nuit, nos yeux orangés et nos cheveux blancs n’arrangent pas du tout les choses. Nous sommes très différents des autres Peuples humanoïdes de Mellesyä.
Comme convenu, je l’attends à sa sortie de classe et nous partons en direction du centre ville. Leylan m’emmène dans une taverne qu’elle connaît bien. Le patron y est sympa et ses boissons sont très bonnes. Nous rentrons dans l’établissement mais la porte d’entrée ne permet pas à Shayna de passer, du coup elle attends dehors. L’intérieur est soft et il n’y a pas trop de monde, ce qui me conviens parfaitement. Nous nous installons à une table placée dans un coin de la pièce et le tavernier, du nom de Alan, vient nous rejoindre en saluant Leylan. Elle me présente et il me dit que c’est grâce à notre père s’il a réussit à installer son établissement à Ekadan. Pour lui c’est un honneur de recevoir ses deux enfants et ils nous réservera toujours un bon accueil. Je le remercie chaleureusement et nous commandons deux bières faites maisons.
Nous profitons de ce court temps que nous passons ensemble à nous raconter des anecdotes du passé et à rire aux éclats. Mais toute bonne chose à une fin et il est temps pour Leylan de rentrer à l’Académie et moi, de reprendre mon voyage. Au moment de payer, Alan refuse en nous disant qu’il nous offre la tournée. Nous le remercions encore de tout coeur puis nous quittons la taverne. Nous disons au revoir à ma soeur et je la regarde s’éloigner, un pincement au coeur à l’idée de la voir partir à nouveau.
Avec Shayna, nous ressortons de la ville et pénétrons dans le bois non loin pour chercher un endroit où dormir à la belle étoile. Une fois trouvé, nous n’installons même pas de camp et nous sombrons dans le sommeil, épuisés.
Au petit matin, nous décidons de partir en direction du Nord-est de Mellesyä pour voir de plus près la Montagne Noire. Le fameux lieu entouré de légendes. C’est après une dizaine de jours de marche que nous l’apercevons enfin. L’endroit est encore plus sombre et effrayant que dans les histoires. Un frisson nous parcours, comme si un vent glacial venait de nous heurter de plein fouet mais sans un souffle d’air dans les alentours.
« Partons, me dit ma louve dans ma tête, je n’aime pas cet endroit. »
J’acquiesce et sans un mot de plus, nous tournons le dos à cette Montagne de malheur. Nous partons en direction de l’estuaire qui coule non loin pour ensuite entrer dans la région de Meludya. L’avantage pour nous de passer par là, c’est que nous pouvons rejoindre Dasiaki, notre ville natale, sans avoir à trop nous aventurer dans la région. Karsen, mon mentor, ne veut pas que j’y remette les pieds mais moi, je veux revoir ma ville. Je veux effacer le souvenir d’elle en flammes que j’ai depuis dix-huit ans. Ce jour là, j’ai pris Leylan et nous avons fuit le combat. Trouvant Karsen à notre entrée dans les Montagnes du Sud, il nous a accueilli et a continué ma formation à la magie harmoniste. Shân, un autre mage avec son faucon géant Ilyk, nous a rejoins quelques années plus tard et a suivi l’enseignement avec moi.
En rentrant en Meludya, nous décidons de garder un mode de vie diurne même si ce n’ai pas mon rythme de naissance mais nous avons dû nous y adapter après notre fuite. C’est ainsi que quelques jours plus tard, nous arrivons dans les environs de Dasiaki. Je m’arrête et observe la ville de loin. Elle a été refaite suite à l’incendie meurtrier mais je vois que le château a été épargner et qu’il domine toujours la cité sur sa petite bute, dépassant les remparts. Nous nous avançons dans sa direction mais à mi-chemin, un blocage me prend. Je n’arrive pas à aller plus loin ! Mes jambes tremblent et refusent de me conduire un pas de plus. Je sens qu’il en est de même pour Shayna qui fini par prendre la parole :
« Ne forçons pas, ce n’est peut-être pas encore le moment pour nous, il nous faut peut-être plus de temps. »
Ecoutant notre corps à chacun, nous décidons de rebrousser chemin et de sortir de la région. Nous partons vers le Sud en prenant soin d’éviter Meludya et nous pénétrons dans le Bois Sacré, la plus grande forêt du Royaume. Nous avons envie de longer la côte pour voir l’océan et comme la forêt s’arrête brusquement au niveau de la falaise, nous pourrons quand même profiter du couvert des arbres pour dormir.
Nous longeons donc cette partie côtière depuis deux jours et nous aperçevons enfin un chemin qui descend vers la plage. Nous l’empruntons et restons un moment à contempler la mer. Nous profitons de l’air marin et du bruit des vagues qui s'échouent sur le rivage. Mais cette paix est vite interrompu par un cri de détresse derrière nous en direction de la falaise. Nous nous retournons vivement. Un gros pan de cette dernière se détache et dévale la pente. Juste en bas se trouve une famille ! Malheur, je n’ai pas le temps de faire appel à la magie et de la malaxer en bouclier au dessus de ces gens ! Du coup, je ne réfléchis même pas. Je l’utilise à l’état pure, sachant très bien les dangers que j’encours. Je forme un dôme protecteur en le durcissant juste à temps car les rochers le percute et vont s’écraser sur le côté. La famille est sauf mais je me sens vider de mes forces. Les ténèbres m’envahissent petit à petit et j’ai juste le temps de voir un homme courir vers moi avant de perdre connaissance.

 

A mon réveil, je suis allongé sur un lit, du moins je crois, et deux enfants de bas âge, un petit garçon et une petite fille, sont à mon chevet. Ce sont des Kanaë, le peuple des Bois, leur peau est cuivrée, leurs oreilles légèrement pointues, les yeux verts et des cheveux bruns aux reflets verts. Dès que nos regards se croisent, ils se lèvent à l’unisson de leur siège :
« Papa ! Maman ! Il s’est réveillé ! » crient-ils ensemble.
J’aperçois alors leurs parents entrer dans la pièce suivi de près par Shayna.
« Comment vous sentez-vous ? me demande la femme en s’accroupissant près du lit.
— J’ai l’impression d’avoir couru dix kilomètres en sprintant. Mais à part ça, tout va bien, ne vous inquiétez pas. »
Je les sens tout d’un coup plus rassuré. Ils devaient sûrement se faire beaucoup de souci à mon égard. C’est au tour de l’homme de prendre la parole :
« Vous nous avez sauvé la vie, merci beaucoup. »
Pour toute réponse j’incline la tête, ne sachant que dire. Je ne suis pas très à l’aise avec les remerciements, je ne l’ai jamais été.
« Monsieur ! Monsieur ! me lance la petite fille. Pourquoi vos yeux ont brillé d’un joli bleu clair ? »
Quoi ? Mes yeux ont fait quoi ? Shayna me dit télépathiquement que c’est la vérité.
Mes hôtes me regardent tous d’un air interrogateur, dans l’attente d’une réponse de ma part. Que leur dire ? Alors que je ne sais même pas moi-même ce qui s’est passé ? Après un bref instant de réflexion, je me lance :
« Pour tout vous dire, je n’en ai pas la moindre idée. C’est la première fois que ça m’arrive. »
Ils restent là, à me fixer, bouche-bée. Je détourne les yeux. Quelque chose me tracasse quand même dans tout ça : j’ai utilisé de la magie à l’état pure sans mourir sous son effet dévastateur. Comment est-ce possible ? Je reste donc pensif un bon moment.
« Vous êtes un mage harmoniste n’est-ce pas ? » me demande l’homme, rompant le silence.
Je hoche la tête en guise de réponse puis leur explique ce pourquoi je voyage. Ils m’écoutent tous attentivement, surtout les parents. Une fois fini, ils me proposent de m’héberger le temps de me remettre et même plus si je le souhaite.
« Vous serez toujours les bienvenus ici, me dit la femme.
— Appelez moi Keyzä, et voici ma louve, Shayna. »
Je leur tends la main et ils la serrent chaleureusement tous les quatre chacun leur tour. Les deux enfants me demandent, tout excités, s’ils peuvent monter sur le dos de ma louve. Je les y autorise, après avoir reçu l’accord de Shayna, et ils s’en vont tous les trois jouer dehors.

 

Trois jours se sont écoulés et je peux à nouveau me lever et marcher, difficilement mais j’y arrive tout de même. Après le repas, les enfants, Asha, le petit garçon, et Ikana, la petite fille, partent se défouler dehors. Pendant ce temps, j’aide la femme, Melyna, et l’homme, Manaë, à faire la vaisselle et ranger un peu la maison. Lorsque soudain, Shayna relève la tête, en alerte. Elle n’a pas besoin de dire quoi que ce soit, j’ai très bien compris ce qui se passe : un danger est là. Sans perdre un instant de plus, je fonce tant bien que mal vers la porte d’entrée et l’ouvre à la volée. Je vois alors trois hommes habillés tel des bandits, se diriger vers le jardin où jouent les enfants. Je réagis immédiatement. Je hurle à Melyna et Manaë de les rentrer tout en courant vers les nouveaux venus.
Une fois les petits à l’abri, je fais appel à la magie et la malaxe en boule de feu. Je la lance alors en direction des agresseurs en guise de prévention. Mais pas de chance pour moi, ils ont un mage incantatoire dans leur rang qui pare sans aucun problème mon attaque. Par contre en retour, il me lance des jets d’acide. Je me jette sur le côté pour les esquiver et me relève aussitôt, prêt à en découdre. Je suis à peine debout que d’autres jets sont déjà sur moi. Comme pour avec la falaise, je ne réfléchi pas et instinctivement utilise encore une fois la magie à l’état pur sans la modifier. Je crée un bouclier juste devant moi. Un vertige me prend. Ca me pompe beaucoup de force de l’utiliser tel quel. Je vois alors les bandits s’approcher dangereusement de la maison et le mage incante quelque chose. Je n’aime pas ça. Le souci, c’est qu’il est resté en retrait de ces deux camarades. Je ne peux donc pas gérer tout le monde en même temps. C’est alors que Shayna sort en trombe de la maison et fonce sur les deux bandits les plus proches. Je me concentre donc sur le dernier. Mais je dois faire vite car je sens encore un vertige. Mais avant de faire quoique soit, une question me vient à l’esprit : dois-je les tuer ou pas ? C’est bien la première fois que je suis confronté à ce problème. Mais la vie de cette famille qui n’a rien demandé et qui risque d’y passer si ces bandits arrivent jusqu’à eux me rends fou de rage. Du coup la question ne se pose même plus. Je garde la magie pure qui est en moi depuis tout à l’heure et l’expulse en forme de grosse pointe vers le mage. Surpris par ma manoeuvre et par la vitesse du projectile, il n’a pas le temps d’esquiver et ce dernier le transperce. Il tombe alors au sol, sans vie. Je me retourne vers les deux autres mais je vois que ma louve les a déjà tués. Elle a eu la même réflexion que moi. Je me ferme à la magie et une fois l’adrénaline du combat redescendue, un violent vertige me prends et je chancelle sur quelque pas avant de tomber à genoux. Manaë accourt à mes côtés pour m’aider à me relever et me soutient jusque dans la maison. Il m’aide à m’asseoir sur une chaise. Ma tête tourne encore. Je m’accroche au bord de la table. Melyna m’appose sur la nuque un chiffon qu’elle a humidifié avec de l’eau fraîche. Les deux enfants sont accrochés à ma chemise et ne me lâchent pas. Comme s’ils voulaient me soutenir à leur façon. Je trouve cela très touchant et un petit pincement au coeur se fait sentir en moi. Puis Manaë rompt le silence qui dure depuis un moment.
« Merci beaucoup, c’est la deuxième fois que vous nous sauvez la vie.
— J’ai déjà perdu des gens que j’appréciais énormément. Je n’aurait pas supporter de vivre ça une deuxième fois. »
Après un autre moment sans réaction de personne, il reprend :
« C’est la seconde fois que vous l’utilisée n’est-ce pas ?
— Que voulez-vous dire ?
— Mon frère était un mage runique, du coup je connais le fonctionnement de la magie. Vous ne l’avez pas modelée pas vrai ?
— C’est exact, c’est les premières fois que ça m’arrive.
— Je ne comprends pas pourquoi vous êtes encore en vie, vous devriez être mort.
— Je pense que c’est ma spécialisation. »
Tout le monde reste pensif suite à ma supposition.

 

Les jours suivants, je décide qu’il est temps de vérifier si mon hypothèse est vraie et je me mets à utiliser la magie à l’état pure en petite quantité. Au fil du temps, j’augmente la dose et je n’ai plus de vertige. Ma conclusion est faite : ma spécialisation est de manier la magie à son état le plus pur sans mourir sous son effet dévastateur.
Après concertation avec Shayna, et avec l’accord de la famille, nous prenons la décision de rester et d’aider les habitants aux alentours contre les bandits. Car ces derniers se font de plus en plus nombreux et violents. Nous avons même découvert qu’il s’agit d’une secte qui a pour but de répandre la terreur partout où ils vont.
Les mois passent et leur effectif diminue énormément. Nombreux de ces bandits périssent sous mes coups, le reste, c’est Shayna et les milices locales qui s’en chargent. Je commence à être connu dans les environs et même que des gens viennent me voir pour me donner des présents en guise de remerciement. Ce geste me touche et je n’ose pas refuser, de peur de les offenser.

Mais tout chose à une fin, et aujourd’hui, il est temps pour moi de reprendre le chemin du retour pour rentrer chez Karsen. Ca fait déjà deux ans. Le temps passe vite. Je fais mes adieux à la famille en leur disant que j’essayerais de repasser les voir puis je prends mon sac de voyage et je repars sur les routes.

  
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